A l’initiative de la FNSEA et l’UIPP (Union des Industries de la Protection des Plantes), l’association Symbiose a été sollicitée pour mettre en place dans la Marne le projet Agrapi, déjà mis en œuvre dans quatre autres régions de France (Vendée, Loiret, Gironde et Hérault). Ce projet à l’ambition de démontrer qu’apiculture et agriculture peuvent coexister de façon constructive et productive sur un même territoire.
Les enjeux
Agrapi est un observatoire de ruches en milieu agricole. Le projet s’intéresse aux paramètres clés du rucher (analyses du pollen, du miel, de la ressource mellifère disponible, de l’état sanitaire du rucher, intervention de l’apiculteur…). Il recense également les pratiques agricoles des agriculteurs voisins, dont l’usage des produits phytopharmaceutiques et dans un rayon de 3 km autour du rucher correspondant à l’aire de butinage. 6 ruches sédentaires ont été implantées sur le territoire de Tilloy-et-Bellay. Elles sont posées sur des balances pour suivre leurs poids et leur température. Ce suivi est réalisé pendant 3 ans.
Résultats 2018
Ronan Vigouroux, responsable Environnement de l’UIPP et Emma Nozières, chargée de mission Apiculture à la FNSEA sont venus présenter les résultats devant les agriculteurs et les apiculteurs concernés par le projet Agrapi. L’année 2018 était beaucoup plus chaude que 2017. La production de miel a été exceptionnelle à Tilloy-et-Bellay, avec une récolte estimée à plus de 600 kg sur les 6 colonies, essentiellement sur colza et luzerne, cultures représentant chacune 11 % des surfaces de l’aire de butinage. Ces bonnes performances correspondent à la moyenne de la région Grand Est qui a doublé sa production de miel en 2018 (source Franceagrimer).
Avec Agrapi, les acteurs du projet ont pu mettre en évidence des faits intéressants : deux colonies côte à côte peuvent avoir un comportement alimentaire très différent et ne pas aller chercher les mêmes pollens. Une alimentation en pollen variée est essentielle pour la bonne santé des colonies : à Tilloy-et-Bellay, Agrapi met en évidence qu’il y a encore une marge de progrès pour augmenter la diversité pollinique, où les agriculteurs ont pleinement leur rôle à jouer.
Côté miel, c’est le nectar qui est un facteur essentiel pour assurer la production. La sécheresse impacte donc non seulement les cultures, mais aussi la production de miel.
Côté traitements phytopharmaceutiques, l’analyse de l’année 2018 fait apparaître que seuls 14 % des substances utilisées par les agriculteurs sont présentes dans le pollen de trappes au moins une fois en avril et juin. L’essentiel des taux sont à la valeur limite de quantification, soit 0,01 mg/kg. Ces valeurs sont très basses au regard des valeurs toxicologiques de référence. Par ailleurs, si les analyses révèlent la présence de résidus dans les matrices apicoles, cela ne semble pas affecter la santé des colonies.
Quels résultats pour 2019 ?
Les années se suivent mais ne se ressemblent pas. L’année 2019 s’annonce plus proche de 2017 que de 2018 en termes de production de miel. Après un épisode très chaud en février, un net rafraîchissement des températures a été observé en avril et en mai, ce qui n’a pas permis à la production de démarrer correctement. La miellée de colza s’est terminée vers la mi-mai, elle est très inférieure à 2018 et sans doute moins abondante que 2017.
Ces résultats montrent que même si le milieu semble à première vue peu favorable aux pollinisateurs (car très fortement dominé par quelques grandes culture peu mellifères), le rucher se porte bien et aucune mortalité n’est à déplorer. Les différents aménagements favorables aux pollinisateurs (bande de luzerne, bandes intra-parcellaire avec de la phacélie, intercultures du type moutarde…) mis en place par les agriculteurs permettent d’éviter les périodes de disette au printemps et à la fin de l’été. Les stocks de pollen, constitués pour l’hiver doivent assurer le démarrage des colonies l’année suivante.
Article rédigé par Mathilde Fournier, FDSEA 51