Journée mondiale de la biodiversité : l’environnement au cœur de l’agriculture

Christiane Lambert (première vice-présidente de la FNSEA) et Benoît Collard (agriculteur à Somme Tourbe).
Christiane Lambert (première vice-présidente de la FNSEA) et Benoît Collard (agriculteur à Somme Tourbe).

« Agriculteurs, producteurs de biodiversité ». Le slogan retenu par le monde agricole à l’occasion de Journée mondiale de la biodiversité du mercredi 22 mai est une réalité sur le terrain. À Somme-Tourbe, dans la Marne, la visite de l’exploitation de la famille Collard a permis de s’en rendre compte. Président de Farre* pour la Marne, Benoît Collard, sa femme Isabelle et leur fils Jean-Baptiste, exploitent 155 ha au cœur de la Champagne crayeuse. Une région qui a connu un fort développement peu propice à la prise en compte de l’environnement. Mais Benoît Collard a fait du combat pour la reconquête de la biodiversité son cheval de bataille. Aujourd’hui, une parcelle a été transformée en espace pédagogique afin de permettre aux visiteurs de balayer lors d’un petit tour de plaine l’ensemble des productions et les techniques mises en œuvre. Une dizaine de cultures sont implantées sur la ferme (blé, orge, colza, betterave, pois, pomme de terre, luzerne,tournesol…), 7 000 volailles partent en vente directe ainsi que quatre Charolais.

Le lièvre et la perdrix sont de retour

« Nous participons à la restauration de la biodiversité », explique Benoît Collard. Le lièvre et la perdrix grise étaient en voie de disparition, victimes du déboisement. « Nous avons replanté des haies et peu à peu nous les voyons revenir ». Les perdrix se plaisent dans les bandes enherbées et elles y trouvent « plein de petits insectes ». Il travaille également avec la Ligue pour la protection des oiseaux et le Conservatoire du patrimoine naturel, « pour mettre en commun nos expériences et éviter les erreurs ».
Favoriser le développement de la biodiversité a un coût. Benoît Collard a investi dans 5 km de haies pour environ 6 000 euros, et 500 euros d’entretien annuel. Il a calculé que l’effet positif sur la pollinisation du colza devrait lui permettre un retour sur investissement en 12 ans.

Symbiose : ensemble pour la biodiversité

Cette démarche est dans la continuité des projets de l’association Symbiose présidée par Hervé Lapie. « Aucune région de France n’a autant changé d’aspect en moins de trente ans que la Champagne crayeuse », observe-t-il. Dans ces espaces jadis boisés et aujourd’hui dédiés aux grandes cultures, les haies, bosquets et talus se font très rares. Le programme Symbiose a pour ambition d’identifier des mesures simples que les agriculteurs et acteurs du monde rural (chasseurs, apiculteurs, LPO, coopératives…) pourront mettre en œuvre pour favoriser le retour des espèces animales et végétales sauvages. « Nous travaillons sur un territoire expérimental de 36 communes et 38 000 ha, depuis Reims jusqu’à l’Argonne », explique Hervé Lapie qui souligne que, « les acteurs de la biodiversité se rassemblent et travaillent ensemble », sans dogmatisme. Le programme Symbiose vise également à être reproductible ailleurs en Champagne-Ardenne.

Ne pas mettre la France sous cloche

Xavier Beulin (président de la FNSEA, à g), et Hervé Lapie (agriculteur et président de Symbiose)
Xavier Beulin (président de la FNSEA, à g), et Hervé Lapie (agriculteur et président de Symbiose)

« Mais que serait la biodiversité sans les agriculteurs ? », interroge pour sa part Christiane Lambert. La vice-présidente de la FNSEA souligne qu’agir dans cette voie c’est, « lutter contre l’artificialisation des sols, accompagner les agriculteurs dans leurs actions et développer des partenariats ». Elle souhaite aussi, « améliorer et diffuser la connaissance sur la biodiversité agricole par la recherche et la formation ». Elle appelle enfin au dialogue entre les agriculteurs et la société « pour apporter des solutions, préserver et restaurer la biodiversité ».
Concluant cette visite sur le terrain, Xavier Beulin a affirmé que, « la prise en compte l’environnement », est un objectif majeur. Le président de la FNSEA préfère cependant, « une démarche intégrée à une démarche réglementaire ». « Ne faisons pas de la France un sanctuaire mis sous cloche », prévient-il. Mais il dit, « oui à une agriculture performante sur le plan économique et sur le plan environnemental ».

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Symbiose : Accompagner des projets cohérents

Mettre en place un programme d’action en faveur de la biodiversité en Champagne-Ardenne. Tel est l’objectif de l’association Symbiose présidée par Hervé Lapie. « Nous avons toute une palette de projets en cours », explique l’agriculteur de La Cheppe et élu de la FDSEA de la Marne. La naissance de Symbiose correspond à la volonté des acteurs du territoire d’anticiper les demandes du Grenelle de l’Environnement concernant la biodiversité et la mise en place de trames verte et bleue et notamment de mettre en oeuvre par une démarche concertée des pratiques et aménagements favorables à la biodiversité.
Pour Hervé Lapie, « face aux enjeux de la biodiversité, l’une des clefs de la réussite est la mobilisation de l’ensemble de la société, c’est dans cet esprit que nous avons construit l’association Symbiose. L’acquisition de connaissances, de références scientifiques et agronomiques, la promotion d’aménagements devront permettre d’accompagner des projets cohérents, efficaces et concertés en assurant la compatibilité avec une production agricole rentable et de qualité. Symbiose devra être un trait d’union entre la profession agricole, le monde rural et citadin. Agissons ensemble ».
Ces actions se déclinent sur le terrain et il est possible de le mesurer avec un peu d’observation. Ainsi, des bandes de luzerne fleuries pour les abeilles ont-elles vu le jour. Lors de la coupe, une bande n’est pas récoltée. Cette surface laissée à la nature va perdre d’accueillir tout un tas de bestioles utiles à la biodiversité : papillons, abeilles, oiseaux… C’est également une source d’alimentation pour cette faune.
On remarquera aussi l’arrivée des bouchons sous l’impulsion de la Fédération des chasseurs. Ce sont de petits bosquets constitués de six essences arbustives. Ils s’intègrent facilement à une parcelle, sans perturber l’activité agricole et servent d’abris à la petite faune sauvage. Et n’oublions pas le grand retour des haies dans la plaine.

Richard Crémonini, Marne Agricole

* Farre : Forum de l’agriculture raisonnée respectueuse de l’environnement.

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