Le 31 mai dernier près de Neuville-en-Tourne-à-Fuy (Ardennes), les experts de RBA, la Fédération des chasseurs de la Marne et de Miroir Environnement ont dressé un premier bilan du suivi écologique des aménagements réalisés sous les pylônes de la ligne électrique de RTE.
Le projet
Pour minimiser l’impact environnemental de la ligne électrique à 400 000 V de 80 km qui relie Charleville-Mézières à Reims, RTE (Réseau de transport d’électricité) a signé un partenariat en 2013 avec Symbiose pour mettre en place des actions concrètes sur le terrain.
En 2016, des aménagements écologiques (couverts herbacés, fleuris ou arbustifs) ont été installés sous 84 pylônes situés sur des espaces de grandes cultures, afin de constituer des connexions et des espaces de refuge pour la faune, les insectes et l’avifaune. 58 agriculteurs sont concernés par ces aménagements.
Pour valider l’intérêt de ces aménagements pour la biodiversité, un suivi écologique de la flore, des pollinisateurs et de la petite faune sauvage a été réalisé par des experts écologues en 2018 et 2020, et sera poursuivi en 2022.
Les acteurs
Hervé Lapie, président de Symbiose : RTE s’est adressé à Symbiose pour sa qualité de guichet unique. Nous avons en effet mobilisé trois partenaires techniques (Réseau Biodiversité Abeilles, la Fédération des chasseurs de la Marne et Miroir Environnement) pour mettre en œuvre ces aménagement et mesurer leur impact écologique. Nous avons également collaboré avec la chambre d’agriculture des Ardennes et la FDSEA de la Marne pour contacter les exploitants agricoles, les propriétaires et les communes concernées par les emprises des pylônes pour mener à bien ce projet. C’est une démarche partenariale également soutenue par la Région. En proposant un catalogue d’aménagements adaptés à chaque territoire, Symbiose est un facilitateur qui permet à des aménageurs comme RTE de gagner du temps et de répondre à de véritables enjeux de biodiversité à l’échelle d’un territoire.
Philippe Dubois, directeur RTE du GMR Champagne-Ardenne : Nos lignes électriques sont installées sur un territoire dont nous ne sommes pas propriétaire. Pour ces raisons, nous nous engageons sur la durée faire coexister nos ouvrages et la préservation de l’environnement. Pour cela, nous participons à des aménagements comme les pas japonais réalisés ici, ou encore des corridors verts, des îlots de biodiversité…, en s’appuyant sur des spécialistes du territoire tels que Symbiose. L’aménagement de ces pylônes nous assure également d’accéder à nos pylônes en toute sécurité.
58 exploitants ardennais et marnais sont au cœur de ce projet. Les pylônes se situent dans leurs parcelles, et ils entretiennent, dans la plupart des cas, les couverts implantés. Ils y trouvent un intérêt écologique mais également cynégétique pour ceux qui chassent. C’est également l’assurance d’un entretien de l’emprise plus facile car maîtrisé. Certains ont installé d’autres aménagements types haies, arbustes… à proximité des emprises de pylônes aménagées.
Un premier bilan écologique
Impact des aménagements sur la flore
Jérémy Miroir, écologue (Miroir Environnement) : les emprises de pylônes ne restent pas longtemps sans espèce végétative si on ne les aménage pas. Très vite, des adventices vont pousser naturellement. L’aménagement herbacé autour des arbustes est donc indispensable pour éviter que ne poussent des espèces qui vont devenir gênantes pour la culture. Quant aux aménagements fleuris, c’était une des premières fois où étaient utilisés à grande échelle des semences d’espèces locales sauvages.
Impact des aménagements sur les insectes, l’avifaune, la petite faune et le gibier
Ils constituent une zone de reproduction et de refuge et peuvent offrir une base d’alimentation. Au moins 18 espèces ont fréquenté les pieds de pylônes, dont des mammifères et des oiseaux. Le chevreuil est l’espèce la plus observée suivi du lièvre brun, de la corneille noire, des rongeurs, de la perdrix rouge et du renard roux.
Jérémy Miroir, écologue (Miroir Environnement) : sur les aménagements fleuris, on observe une diversité d’espèces d’insectes intéressante et notamment des espèces un peu spécialisées, voire en danger.
Solène Allart, Fédération des chasseurs de la Marne : les chevreuils aiment bien les aménagements arbustifs et herbacés, de même que les perdrix en fin d’été et en automne-hiver car elles y trouvent beaucoup d’insectes. On y observe également des lièvres, des renards, des rapaces nocturnes, des blaireaux et parfois des sangliers.
Impact des aménagements sur les pollinisateurs
Les couverts herbacé, arbustif et ceux exprimant un faciès de type « sauvage » sont les plus intéressants car ils comprennent des plantes à fort potentiel de fleurs (lotier jaune, matricaire, Picris, Cirse des champs). Les espèces observées sont principalement des espèces généralistes avec des capacités de migration importantes (Bombus terrestris, Eristalis tenax…). Les emprises offrent également un bon support pour les abeilles solitaires
Clara Amy, Réseau Biodiversité pour les Abeilles : les aménagements arbustifs seront vraiment intéressants quand ils seront un peu plus développés et fleuriront. Ils constituent un plus pour aider certaines populations à migrer et à se reproduire. Dans les aménagements fleuris, la floraison peut commencer début mai et durer jusqu’à fin juillet, voire fin août. On y retrouve des bourdons, des abeilles sauvages et des papillons